Lors des élections présidentielles de mai 2006 qui marquait la fin du séparatisme et qui consacrait la tournante à l'île d'Anjouan, le Président Sambi a obtenu la confiance de près de 56% de la Population comorienne. Cette élection jugée transparente et démocratique par tous les observateurs, était considérée comme un raz de marée, une volonté de changement.
Cette popularité avait une double origine : M. Sambi a su faire comprendre aux comoriens par toute une série de promesses, les unes plus irréalistes que les autres. M. Sambi était un nouveau venu dans la classe politique nationale à qui les comoriens font porter la responsabilité de tous leurs malheurs. Il bénéficiait alors d'une présomption d'honnêteté. Ce candidat atypique, est un chef religieux charismatique. Cet homme qui cite Dieu, à chaque fois, dans ses discours électoraux, ne pouvait pas trahir.
Le Président Sambi a promis des « bonnes surprises », un eldorado, la terre promise à la population.
Plus de trois ans plus tard, la population attend toujours les surprises et assiste jour après jour à une dégradation effrénée des conditions de vie et à une dilution de l'Etat qui annihile toute perspective. L'autorité de l'Etat est totalitaire et insensible aux revendications des corps enseignant, des agents de la santé, des religieux qui se révoltent contre la montée du chiisme aux Comores.
Dans l'armée, les galons se distribuent aux copains du régime. Dans l'administration, les postes se distribuent non pas aux méritants mais plutôt aux militants. La diplomatie cafouille. La priorité accordée aux relations avec l'Iran chiite n'a rien apporté. Les promesses continuent à se faire et à se défaire. Après avoir promulgué les lois sur le transfert des compétences aux îles et promis solennellement en public que le transfert se réalisera, le Président Sambi a fait marche arrière, provoquant la rupture avec les Présidents des îles. Anjouan sombre de plus en plus dans l'ombre du séparatisme, réveillant des germes séparatistes en Grande-Comore.
Les acquis de la Conférence de Maurice sont enterrés. C'est dans cette atmosphère de désespoir et de déception d'un peuple qui avait cru à une amélioration de sa condition de vie, que le pouvoir actuel se prépare à prolonger le mandat d'un président sans programme ni plan d'action.
Le bilan que fait Hafidh sur le régime de Sambi est laudateur, soporifique et mensonger. Un autre regard critique s'impose. Comme il a lancé le débat,il se doit d'avancer des chiffres. Mohamed Inoussa, journaliste critique vis-à-vis de tous les régimes a donné des indices par rapport au taux de croissance, faisant ainsi une comparaison entre 2005 et la période (2007-2009).
Désormais, Hafidh ouvre une brèche pour que chacun fasse sa propre analyse sur les atouts et faiblesses du Président Sambi et de ses capacités réelles à pouvoir relever le défi du développement du pays. Ce débat permettra enfin de sensibiliser la population sur les conséquences dangereuses d'une confiance accordée sur la base de promesses électorales irréalistes.
I.- Les Institutions :
A- Dans le domaine des institutions, l'on enregistre une violation flagrante de la Constitution
1. Le Chef de l'Etat a créé une crise politico-institutionnelle aigue en refusant d'abord de promulguer les lois cadres relatives à la répartition des compétences entre l'Union et les îles, pour les promulguer ensuite et bloquer leur application. Cette violation flagrante de la Constitution, est en contradiction avec ses déclarations électorales, les engagements pris avant son élection auprès des Présidents des îles, ses discours officiels sur le partage des compétences.
2. Malgré les nombreuses interpellations des partis politiques et de la Société civile, le Président Sambi persiste dans son refus d'octroyer les compétences aux Exécutifs des îles.
3. La Cour Constitutionnelle, juge de la Constitution, a connu elle aussi des interférences manipulatrices illégales de la part du gouvernement qui ont abouti à l'éviction de deux de ses Présidents. Cette ingérence inacceptable a ému toutes les tendances socio- politiques du pays et la communauté internationale, représentée à Moroni. Elle constitue une violation flagrante de l'indépendance de cette haute juridiction, reconnue par le Constitution. Elle est une man?uvre de mise sous tutelle au profit du pouvoir. Elle est aussi une menace sérieuse pour la démocratie et la réconciliation nationale.
B.- Fragilisation des institutions de l'Etat
1. Le putsch perpétré à la Cour Constitutionnelle pour la mettre au pas, illustre bien l'autoritarisme et le pouvoir solitaire du Président Sambi. Par son incapacité à se plier à la règle de droit et à ne pas supporter la contradiction, il a fragilisé et décrédibilisé la plus haute juridiction du pays.
2. Les lois relatives aux sociétés d'Etat, notamment sur les monopoles et la privatisation, sont purement et simplement violées par le pouvoir de Sambi. L'ONICOR est ainsi privé de son droit de monopole au profit d'hommes d'affaires proches du pouvoir. Il en est de même pour la société comorienne des hydrocarbures dont une grande partie des activités a été cédée à un opérateur étranger ayant des connivences avec le régime, sans la moindre consultation du législatif. Les règles et conditions d'attribution des marchés publics ne sont plus respectées, parce qu'il faut satisfaire les amis politiques.
C.- Instrumentalisation, déstabilisation et division de l'armée
1. L'armée qui a toujours su garder un sens républicain est divisée, traversée par des courants insularistes et des penchants politiques jusqu'ici non affirmés et revendiqués. Elle est transformée par le nouveau régime en un instrument de répression et d'intimidation.
D. Incohérence et absence notoire d'harmonie dans l'exécution du Budget National
1. Les par toutes les entités ? Gouvernement central et Exécutifs des îles- ont été modifiés d'une façon unilatérale, au profit d'autres mécanismes centralisateurs et peu soucieux des règles de transparence.
2. Malgré l'insistance de l'Assemblée de l'Union sortante et les recommandations du FMI, le Chef de l'Etat s'obstine à ne pas intégrer les dons et subventions octroyés à l'Etat, dans le Budget National. La gestion de ces fonds, relève ainsi du domaine exclusif du Chef de l'Etat, qui n'a jamais dévoilé officiellement l'utilisation qu'il en fait.
3. Le Gouvernement a fait peu de cas des critères de convergence adopté par les pays de la zone franc et introduits dès la préparation du Budget 2006 : le respect de ces critères aurait pourtant permis de limiter la masse salariale aux normes requises, d'augmenter les investissements intérieurs etc...
E. Conséquences des abus commis sur le plan institutionnel
Le processus de réconciliation nationale est bloqué par la déstabilisation de toutes les institutions, le refus manifeste de la règle de droit par le Chef de l'Etat qui anesthésie l'opinion, chaque fois qu'il se sent en difficulté, par des effets de manche et de l'esbroufe et par le déficit de volonté politique. Anjouan peut ainsi poursuivre tranquillement sa gestion solitaire. Les échéances démocratiques à venir, semblent compromises ou sans objet. Ainsi, l'unité Nationale est sapée et fragilisée, le séparatisme est revigoré et consolidé,la désintégration du Pays est établie, la stabilité politico- institutionnelle est compromise
II.- La bonne Gouvernance :
1. La gouvernance, qui est la manière d'exercer le pouvoir est un des principaux piliers de tout Etat de droit. Ce principe fondamental semble avoir coloré toute la campagne présidentielle de M. Sambi. Il était un de ses thèmes favoris. Mais, curieusement, au pouvoir, il oublie ses promesses et pire encore, il met un coup d'arrêt brutal aux avancées significatives acquises dans ce domaine pendant ces dernières années.
2. Il interrompt les efforts continus du pays, en matière de respect et de protection des droits de l'homme. Il oppose le citoyen à la justice, monte la population contre les agents de l'Etat, érige la suspicion, la délation en principe. Il politise à outrance l'administration, dilue le sens de l'intérêt général et procède à une vaste chasse aux sorcières de tout fonctionnaire, quelque soit son rang, suspecté de sympathie avec son prédécesseur.
3. Le gouvernement Sambi, par sa pratique et par conviction, met en cause l'organisation de l'Etat, sans en proposer un autre modèle que le pouvoir personnel.
A.- Fonctionnement de la justice
1. La justice pour tous, la justice indépendante, sont un leurre sous l'ère Sambi. Elle est devenue partiale et partielle, politisée à outrance.
2. Le pouvoir piétine le droit. Il orchestre des nominations politiques pour neutraliser l'impartialité des juges tout en martelant à chaque discours que la Justice est indépendante.
3. Il sanctionne ceux qui n'obéissent pas à ses injonctions politiques par une utilisation abusive de la Justice dont l'un de ses buts est de réprimer toute contradiction et tout esprit critique contre le pouvoir. La suspension de tous les magistrats de la Chambre d'accusation pour avoir lu le droit en est l'illustration.
B.- Respect des droits et libertés individuelles
1. Le Chef de l'Etat semble avoir une conception sectaire du pouvoir. Par sa gouvernance et la brutalité de ses méthodes, par son approche du pouvoir, il porte atteinte à la dignité humaine et l'on vit au quotidien, une violation flagrante des libertés individuelles et collectives.
C.- Transparence dans la gestion des fonds publics
1. Le pouvoir Sambi agit en marge droite et s'exonère de toute légalité, surtout en matière de gestion des fonds publics. Le mépris des procédures comptables généralement admises est patent.
2. Il s'abstient de respecter la comptabilisation et la budgétisation de certaines opérations financières, ne serait-ce que pour éviter l'opacité qui peut lui être reproché par les partenaires, avec des conséquences négatives pour le pays.
3. On constate un flou voulu et entretenu sciemment dans la gestion des dons octroyés à l'Etat par certains pays étrangers.
D.- Gestion des sociétés d'Etat
1. L'état de santé financier de ces sociétés est critique à cause de la mauvaise gestion.
2. On viole systématiquement les règles d'attribution des marchés publics et les lois sur le monopole (onicor, sch, etc.)
E.- Situation de l'administration publique
1. On assiste à un népotisme avéré et à la promotion du clan familial du Chef de l'Etat dans la nomination aux hautes fonctions de l'administration publique.
Mais enfin, je doute de l'identité de M. Hafidh qui prétend être fonctionnaire du FMI. Dans le système international, il y a des valeurs, des normes de conduite et un devoir de réserve très contraignant :
o Éviter les déclarations publiques controversées
o Discrétion sur les questions officielles
o Observer en tout temps la réserve et le tact diplomatique
Qu'est-ce que le «devoir de réserve» ?
Le devoir de réserve est une chose aussi éminemment moraliste qu'indéfinie, consistant dans «l'obligation morale particulière de se garder de tout excès dans ses propos et de se montrer discret, retenu (...).
Ali Mohamed
Ministère des finances des Comores